• Qui veut la peau de Dieudonné ?

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    Propos recueillis par Silvia Cattori en mai 2005
     
    Qui veut la peau de Dieudonné ?

    Quand en mai 2005 nous avions rencontré Dieudonné, au plus fort de la tempête qui s’abattait sur lui, il avait, depuis décembre 2003, subi 18 procès … et avait été relaxé 17 fois. Ce qui montrait au minimum que les procès qu’on lui intentait relevaient alors du harcèlement. Nous avions eu en face de nous un homme sensible, heurté par les accusations portées contre lui - suite à un simple sketch - très affecté par la haine de ceux qui appelaient à boycotter ses spectacles, mais qui restait néanmoins tel que lui même très cohérent et pondéré, comme le montre l’entretien reproduit ici. Depuis lors huit années se sont écoulées au cours desquelles les attaques contre lui n’ont jamais cessé et nous posons la question : Dieudonné, n’a-t-il pas été la victime d’un système cruel et sans pitié ? Un homme, qui atteint dans sa dignité, humilié et poussé à bout par ceux qui ont juré sa perte, s’est nourri de ce qu’il a enduré jusqu’à l’excès ? [S.C]

     




    Dieudonné


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    Alors que la défense des citoyens devrait être au cœur de la politique, il n’en est rien ; l’État, les élus, participent de la campagne d’intolérance qui frappe actuellement Dieudonné (*). Or, quand tous les pouvoirs se transforment en procureurs en cédant aux pressions d’organisations tribales, ce sont les fondements d’une société démocratique qui sont ébranlés.

    Les affirmations de Proche-Orient Info - un site spécialisé dans la défense des intérêts israéliens - attribuant à Dieudonné des propos qu’il n’a pas tenus, auraient dû être considérées avec précaution par la classe politique. Or celle-ci a cédé aux pressions d’officines qui font constamment peser sur les journalistes, les politiques, les intellectuels, l’accusation du prétendu « antisémitisme ». Dire d’une personne qu’elle est « antisémite », « néo-nazie », « fasciste », « négationniste » - accusations sans fondement dans la grande majorité des cas - est un procédé totalitaire. Ainsi estampillés, lésés financièrement et moralement, même innocentés par les tribunaux, les accusés n’en demeureront pas moins salis, marginalisés, exclus pour le restant de leurs jours.4

     



     

    Silvia Cattori : Dieudonné, depuis notre première rencontre, en novembre 2004 [1], vous êtes l’objet d’attaques. Déjà dix sept procès...


    Dieudonné : Dix huit.

     

    Silvia Cattori : Dix huit tribunaux en une année c’est beaucoup !?


    Dieudonné : Bien sûr, c’est énorme ! On préférerait passer son temps à autre chose. Mais il suffit de penser à Mandela, à Martin Luther King, à Tjibaou, pour se dire, voilà, il y a des causes difficiles. Je ne pense pas que je verrai de mon vivant le résultat de tous les efforts consentis pour parvenir à l’égalité des droits. J’y participe à mon humble niveau. Il n’y a rien de désespérant si on projette son action sur plusieurs générations. On se dit, bon, ça avance un petit peu. Quant aux faits que l’on me reproche, j’ai été relaxé dix sept fois.


    Silvia Cattori : Sur quelle base vous accuse-t-on ?


    Dieudonné : On m’accuse d’avoir offensé la religion juive. Or ce n’est pas du tout un fait religieux que j’ai caricaturé lors de mon sketch en décembre 2003. J’ai caricaturé un fait politique.

    Il y a une telle violence en face, une telle haine ! Une telle férocité ! On m’a harcelé, frappé physiquement. À un moment donné on s’habitue à tout. Puis cela vous donne de l’énergie. On arrive à transformer cette énergie négative en positif, à se servir de toute cette folie, pour rentrer en soi et créer. Si j’ai écrit autant de spectacles en si peu de temps c’est sans doute en partie à cause de toute cette pression qui a pesé sur mes épaules. A un moment donné je dois passer à la phase de l’expression.


    Silvia Cattori : Qui vous accuse plus précisément ?


    Dieudonné : Des représentants du CRIF (Conseil représentatif des institutions juives de France), de l’UEJF (Union des étudiants juifs de France), ... et les journalistes qui travaillent dans la même optique qu’eux. Tout ce que vous dites est passé au crible, pour vérifier s’il y a un mot qui permettrait de porter plainte contre vous.


    Silvia Cattori : Une plainte a été déposée également en Suisse suite aux propos que vous aviez tenus, en février 2004, sur le plateau de la Télévision Suisse Romande…


    Dieudonné : C’est un certain Isaac Cohen qui allègue, entre autre, que j’aurais « accusé l’État juif d’avoir collaboré à un programme d’extermination raciale en Afrique du Sud ». Mais le tribunal de Genève, en Suisse, a rejeté cette plainte.


    Silvia Cattori : Quand, à Alger, vous avez parlé de « pornographie mémorielle » n’avez-vous pas dérapé ?


    Dieudonné : Je crois qu’il n’y a rien d’extravaguant à dire que l’instrumentalisation politique de la souffrance est obscène. Sur le fond je trouve que c’est une bonne formulation. On doit pouvoir parler de pornographie mémorielle quand il y a des abus. Ces termes ne sont pas de moi. S’ils provoquent des réactions contrastées, ouvrons le débat. Parlons de ce qui pose problème. Ne détournons pas les faits.


    Silvia Cattori : Vous sentez-vous l’objet d’une cabale ?


    Dieudonné : Complètement. On m’a prêté des propos que je n’ai pas tenus. On a dit « Dieudonné a dit que la Shoah est une pornographie mémorielle ». Je n’ai jamais dit cela. Je n’ai jamais associé la Shoah à cette phrase. Ce à quoi je me référerais, n’avait évidemment rien à voir avec le passé nazi. C’est insensé de vouloir me prêter des idées qui sont si éloignées de moi.


    Silvia Cattori : Quel intérêt avait le site Proche-Orient info à diffuser une information falsifiée ? Miser sur son effet médiatique tapageur pour transformer l’humoriste en scandale de la République et vous faire taire ?


    Dieudonné : Je crois que c’était un projet de solution finale en ce qui concerne mon existence médiatique. Ils ne peuvent pas me faire taire. Je ne crains rien. Je subis ce chantage pour m’être opposé au lobby sioniste. Ils ont voulu me frapper professionnellement et financièrement. Nous avons porté plainte contre le site Proche Orient info. Je n’ai rien à me reprocher. Quand je regarde mes enfants je me sens bien avec moi. Vous me direz que c’est facile à dire puisque je peux les nourrir.


    Silvia Cattori : Pensez-vous pouvoir sortir gagnant ?


    Dieudonné : J’irai jusqu’au bout de mon parcours d’humoriste. Si je dois m’arrêter à 40 ou 41 ans, ça aura déjà été un temps de pur plaisir. J’ai toujours fais mon métier sincèrement. Si je devais me plier ce ne serait plus le même travail. Faire rire de manière bêtement mécanique, non. J’aime qu’il y ait une réflexion dans l’humour. Sinon je ne m’y retrouve pas. Je crois que je continuerai tant que cela sera possible. J’adore la scène. Mais, s’il le faut, je suis capable de faire autre chose. Si je dois m’autocensurer, renoncer à ma liberté de pensée pour continuer d’exister comme humoriste, cela ne m’intéresse pas.


    Silvia Cattori : Vous paraissez serein, malgré tout. Mais êtes-vous conscient du danger. Que vous êtes pris dans une guerre ?


    Dieudonné : Oui c’est une guerre.


    Silvia Cattori : Ceux qui la mènent, veulent la gagner. Et ils y mettront les moyens.


    Dieudonné : Oui, je sais.


    Silvia Cattori : Comment supportez-vous le fait de savoir que ce sont principalement des journalistes appartenant au lobby pro-israélien, comme Elisabeth Schemla (elle a créé Proche Orient info) et des intellectuels comme BHL, qui sont le plus engagés contre vous ?


    Dieudonné : Je suis vraiment pour eux le diable. Ils ont déclenché une guerre nucléaire contre un moucheron. Un moustique qui peut piquer, mais bon, qui ne tue pas. Ils me font des procès, ils peuvent aller jusqu’à me frapper, ils peuvent me tuer financièrement. Là, ils sont au maximum de ce qu’ils peuvent faire. Pour faire plus, ils doivent passer à quelque chose qui n’est plus légal. Par chance je n’ai quasiment pas de besoins. J’ai un théâtre. Il tourne. Ce qui me donne cette légèreté artisanale qui fait qu’on peut rebondir.


    Silvia Cattori : Dans votre spectacle « 1905 » vous dites « tôt ou tard ils vont me dégommer ». Vous le pensez sérieusement ?


    Dieudonné : Je me dis qu’effectivement, face à toute cette haine, il peut y avoir un ou deux déséquilibrés qui...


    Silvia Cattori : N’avez-vous pas peur de ce qui peut arriver si vous continuez de leur tenir tête ?


    Dieudonné : Non, je n’ai pas peur ; je ne vis pas dans la peur. On m’a déjà frappé, je sais ce que cela signifie. S’ils m’attaquent avec un couteau, cela peut être dangereux. Je m’attends au pire en toute sérénité. La peur est un sentiment qui est en chacun de nous. Il faut lui laisser une petite place. Mais pas la première place. Ce qu’il y a de plus difficile à assumer dans cette guerre, c’est que face à la haine on se trouve constamment pris dans le tourbillon de la défense. Je n’ai jamais répondu aux attaques. Sauf devant les tribunaux ; et sur scène où je puis faire rire de ce vécu.


    Silvia Cattori : Vous avez de l’audace. Car vous parlez de vicissitudes qui ne sont pas visibles aux yeux de tous et font partie du non dit, mais qui deviennent immédiatement palpables dans vos spectacles. Et déclenchent le rire...


    Dieudonné : Je crois que c’est le rôle de l’humoriste. Je n’ai pas de regret par rapport à mon travail. Je l’ai fait honnêtement et sincèrement. Yo soy un hombre sincero. (rire)


    Silvia Cattori : Au travers de cette mise au pilori vous avez enfreint un tabou, ouvert un champ qui dépasse le cadre de la France ; vous avez réussi à rassemblez ceux que des association prétendues « antiracistes », instrumentalisées par le PS, ont elles paradoxalement divisé : beur, black, blanc...la couleur disparaît ; et le sentiment que dans la lutte contre l’injustice, « on est tous des nègres » a fini par prévaloir ? Aussi, le débat autour du film sur l’esclavage et la colonisation, sur lequel vous travaillez, n’a-t-il pas voulu éveiller les consciences de ceux et celles qui sont sensibles à une mémoire coloniale mal assumée ? Autrement dit, n’est-ce pas la voix de l’universalisme laïc que l’on étouffe et que votre dernier spectacle met en débat ?


    Dieudonné : Oui. Cette description me ressemble bien. Ma mère est blanche, mon père est noir. Je n’ai pas de religion. Je suis prédisposé peut être à l’universel de manière naturelle. Cela n’a pas été un problème pour moi d’envisager la fusion avec le reste de l’univers. Je conçois que, pour certains, c’est difficile de quitter le nid douillet du communautarisme. Ca fait peur. Mais c’est la préhistoire de l’humanité, le communautarisme. C’est Néandertal et Cromagnon. Mais voilà, on a peut être une autre destinée que l’affrontement communautariste cyclique.


    Silvia Cattori : A côté des aspects pénibles, n’y a-t-il pas eu des bonnes et belles surprises ?


    Dieudonné : Ah ! Oui, il y a eu des choses formidables. Une chaîne de solidarité, d’amour même, que je ne pouvais même pas imaginer. C’est un bonheur de voir des familles entières qui disent vouloir me protéger.


    Silvia Cattori : Vos spectacles ouvrent-ils en quelque sorte des portes en donnant la clé pour comprendre dans quelles turpitudes le monde politico-médiatique évolue en France ?


    Dieudonné : Oui. C’est important de comprendre à quel point il y a de l’agressivité et de la haine chez ceux qui veulent dominer. De comprendre que le pouvoir rend fou. Et que le pouvoir de l’argent, le pouvoir du monde de la nuit et du spectacle n’est pas quelque chose de brillant.


    Silvia Cattori : Ce monde de la nuit ne vous manque-t-il pas ?


    Dieudonné : Non, non. Ce n’est pas mon univers. Je n’ai jamais habité Paris. J’ai fait trois ou quatre sorties, peut être un peu plus. Non ce monde de la nuit et du spectacle médiatique ne m’attire pas.


    Silvia Cattori : Si je comprends bien, vous aimez vous mettre sur le fil à la façon d’un Don Quichotte...


    Dieudonné : Oui, on commence à m’en parler. La liberté est aussi une histoire de mots, de dialectique. L’autodérision est bénéfique quand le doute s’installe. Un artiste doit pouvoir s’exprimer sans peur. Il y a un public face à lui qui s’interroge, qui a également besoin de cette liberté. Le rire est là pour le libérer de ce qui lui pèse. Je parle de ce rire sincère, qui peut déranger le pouvoir, mais qui est salutaire. Un artiste ne doit pas tricher, ne doit pas s’autocensurer. Si je devais faire de la politique je saurais m’adapter. Mais là je fais mon métier d’humoriste. Le rire a besoin de liberté.


    Silvia Cattori : Vous transmettez par l’humour une critique que les forces progressistes semblent curieusement incapables d’assumer ?


    Dieudonné : L’idée qu’un clown, qu’un humoriste de couleur, puisse ébranler ce pouvoir si écrasant qu’est le sionisme, un pouvoir qui a déjà généré tant d’injustices, n’est pas pour me déplaire.


    Silvia Cattori : La partie n’est pas jouée. Pour l’instant n’est-ce pas vous qui êtes sur le gril ?


    Dieudonné : Ma nature étant ce qu’elle est, je ne peux pas me compromettre, collaborer.


    Silvia Cattori : Qu’entendez-vous par « collaborer » ?


    Dieudonné : Jouer les amuseurs d’État. Les amuseurs asservis au pouvoir.


    Silvia Cattori : Du temps où vous vous étiez la coqueluche des plateaux télévisés ne l’avez-vous pas fait ?


    Dieudonné : Non, j’ai travaillé honnêtement. J’ai fait ce chemin en toute naïveté.

    Silvia Cattori : En toute naïveté ?


    Dieudonné : Oui, en toute naïveté. Par mon parcours j’ai découvert... j’ai vu des choses, tout cela s’est recoupé et voilà, je suis dans la situation que vous savez. Et je ne m’en plain pas. Je crois que je peux continuer quoi qu’il arrive.


    Silvia Cattori : Ces avanies ne vous ont-elles pas révélé une capacité à endurer, à rebondir... ?


    Dieudonné : Ma nature, encore une fois, ce n’est pas de résister, de rendre les coups. Quand je m’investis pour une idée, je le vis comme une libération. Cette expérience me libère des chaînes, des leurres, et l’agressivité de ceux qui veulent me faire taire n’y changera rien. Cela peut paraître étrange. On me frappe. Dans un premier temps j’ai envie de rendre les coups. Mais je ne les rends pas. On me frappe encore et là je ne sens quasiment plus rien. C’est comme si cela ne me concernait plus. Je me sens un peu spectateur et j’ai un peu pitié de ceux qui m’en veulent. En France il y a un aveuglement autour de l’accusation d’antisémitisme.


    Silvia Cattori : C’est une belle posture, mais on ne fait pas une carrière avec ça !


    Dieudonné : Quelle carrière devrais-je faire ? Celle de qui ?


    Silvia Cattori : Celle que peuvent faire les autres humoristes, comme Elie Semoun et Jamel Debbouze...


    Dieudonné : Je ne voudrais pas. Je les trouve formidables. Mais je n’ai pas le courage de me compromettre jusque là. Je n’ai pas cette force.


    Silvia Cattori : Parce qu’il faut se compromettre ?


    Dieudonné : Oui.


    Silvia Cattori : Quand vous voyez ou vous sentez que les choses qui ne sont pas nettes cela vous attriste ?


    Dieudonné : Je ne suis pas de nature triste. Mon entourage vous dirait que je ne suis pas triste. Mais je peux souffrir, être attristé, comme tout le monde.

     

     

    Silvia Cattori : Pleurez-vous parfois ?


    Dieudonné : Oh ! Je pleure comme tout le monde. Je pleure de temps en temps. Je pleure seul. Cela fait du bien. Quand les gens m’aiment c’est plutôt là que les larmes viennent. Pas quand on me blesse.


    Silvia Cattori : Avec vos spectacles vous avez de nombreuses occasions de pleurer ? Il y a beaucoup d’amour dans le public.


    Dieudonné : Oui, c’est vrai. Quand les gens sont sincères cela me touche.



     

     

    (*) Marc-Édouard Nabe a rendu compte de cette affaire en février 2004. Voici un extrait tiré de son ouvrage J’enfonce le clou, Chapitre 9, page 81 :


    « L’affaire a tourbillonné si haut qu’on a vraiment cru qu’il méritait la corde. Pour avoir fait quoi ? Un sketch chez Marc-Olivier Fogiel en hommage à son ami Jamel Debbouze. Dieu-donné, méconnaissable, sous une cagoule de nationaliste corse et un treillis militaire de Tchétchène, la voix transformée, lisait un tract censé ironiquement mettre en garde la France contre le dangereux perturbateur maghrébin Debbouze. Son person­nage portait aussi un chapeau de rabbin et des papillotes. Il représentait un intégriste israélien qui voyait dans la présence de Jamel sur le plateau de télévision « un acte antisémite » (sic !), un terroriste menaçant qui disait s’être récemment converti au fondamentalisme sioniste et qui finissait par encourager les jeunes gens dans les cités à « rejoindre l’axe du Bien, l’axe américano-sioniste ». Textuel. Je dis textuel car ce sketch, peu l’ont vu, tout le monde en a parlé et personne n’en a lu le texte. Le texte du sketch ! Sur le coup, Jamel et les autres invités et même Fogiel et sa cointervieweuse étaient écroulés de rire comme si, de toute façon, ça ne pouvait pas ne pas être drôle puisque c’était signé par un humoriste. Heureusement, le sketch n’était pas drôle, il était juste fait (...) pour imaginer ce qu’un colon israélien totalement fanatique pourrait lancer comme discours belliqueux sur les plateaux de télévision si on l’invi­tait. »


    Silvia Cattori

     

    http://www.silviacattori.net/article5224.html

     

     

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    Les médias traditionnels et les politiques commencent la nouvelle année avec une résolution partagée pour 2014 : Museler définitivement un comédien franco-africain qui devient trop populaire auprès des jeunes gens.
    2 janvier 2014

    Diana_Johnstone_texte.jpg                                                                   Diana Johnstone

     

    Entre Noël et la Saint-Sylvestre, ce n’est personne d’autre que le Président de la République, François Hollande qui, lors d’une visite en Arabie Saoudite pour de (très grosses) affaires commerciales, a déclaré que son gouvernement devait trouver un moyen d’interdire des spectacles de l’humoriste Dieudonné M’Bala M ‘ Bala, ainsi qu’a appelé à le faire le ministre français de l’Intérieur, Manuel Valls.

    Le leader du parti conservateur d’opposition, l’UMP Jean-François Copé, a fait immédiatement chorus en apportant un « soutien total » à la réduction au silence de l’incontrôlable comédien.

    Au milieu de ce choeur médiatique unanime, l’hebdomadaire Le Nouvel Observateur a écrit en éditorial que Dieudonné est « déjà mort, » lessivé, fini. La rédaction débattait ouvertement de la meilleure tactique entre essayer de le faire emprisonner pour « incitation à la haine raciale », l’annulation de ses spectacles sur la base de potentielles « menaces de trouble à l’ordre public, » ou l’exercice de pressions en menaçant les communes de diminuer le montant des subventions pour la culture si elles l’autorisent à se produire. L’objectif de Manuel Valls, le patron de la police nationale, est clair, mais le pouvoir tâtonne quant à la méthode.

    Le cliché méprisant qui est constamment répété est que « Dieudonné ne fait plus rire personne. »

    En réalité, c’est le contraire qui est vrai. Et c’est là le problème. Dans sa récente tournée dans les villes françaises, des vidéos montrent de grandes salles archi combles pliées de rire devant leur humoriste préféré. Il a popularisé un geste simple qu’il appelle la « quenelle. » Ce geste est imité par des jeunes gens dans toute la France. Elle veut dire tout simplement et à l’évidence : on en a marre.

    Pour inventer un prétexte pour détruire Dieudonné, la principale organisation juive, le CRIF (Conseil Représentatif des Institutions Juives de France, équivalent français de l’AIPAC) et la LICRA (Ligue internationale contre le racisme et l’antisémitisme), qui jouit de privilèges particuliers dans le droit français (la journaliste parle du droit de se porter partie civile, NdT) ont sorti une histoire extravagante pour qualifier Dieudonné et ceux qui le suivent de « nazis. » La quenelle n’est selon toute évidence qu’un geste grossier signifiant à peu près « dans ton cul » avec une main placée en haut de l’autre bras pointé vers le bas pour préciser la longueur de la quenelle.

    Mais pour le CRIF et la LICRA, la quenelle est « un salut nazi à l’envers ». (On n’est jamais assez « vigilant » quand on cherche un Hitler caché) Comme quelqu’un l’a remarqué, un « salut nazi à l’envers » peut tout aussi bien être considéré anti-nazi. Si encore le geste a quelque chose à voir avec Heil Hitler. Ce qui n’est manifestement pas le cas.

    Mais le monde des médias reprend cette affirmation, en signalant tout du moins que « certains considèrent la quenelle comme un salut nazi à l’envers. » Peu importe si ceux qui pratiquent ce geste n’ont aucun doute sur ce qu’il veut dire : N…e le système !

    Mais jusqu’à quel point le CRIF et la LICRA sont-ils « le système » ?


    La France a un grand besoin de rire


    L’industrie française est en train de disparaître, avec des usines qui ferment les une s après les autres. L’imposition des citoyens à faibles revenus est à la hausse, pour sauver les banques et l’euro. La désillusion vis-à-vis de l’Union européenne est de plus en plus forte. Les règles de l’UE empêchent toute action sérieuse pour améliorer l’état de l’économie française. Pendant ce temps, les politiciens de gauche et de droite continuent leurs discours creux, émaillés de clichés sur les « droits de l’homme » – en grande partie comme prétexte pour aller à la guerre au Moyen-Orient ou pour des diatribes contre la Chine et la Russie. Le pourcentage d’opinions positives sur le président Hollande a dégringolé à 15%. Pourtant les gens votent, avec pour résultat les mêmes politiques, décidées par l’UE.

    Pourquoi alors la classe dirigeante concentre-t-elle sa vindicte sur « l’humoriste le plus talentueux de sa génération" (ainsi que le reconnaissent ses confrères, même quand ils le dénoncent) ?

    La réponse en bref est probablement que la popularité montante de Dieudonné auprès de la jeunesse illustre un accroissement de l’écart entre générations. Dieudonné fait rire aux dépends de l’ensemble de l’establishment politique. Ce qui a eu pour conséquences un torrent d’injures et de démarches pour interdire ses spectacles, le ruiner financièrement et même le faire aller en prison. Les attaques verbales fournissent le contexte propice à des agressions physiques contre lui. Il y a quelques jours, son assistant Jacky Sigaux a été agressé physiquement en pleine journée par plusieurs hommes masqués devant la mairie du 19ème arrondissement – juste en face du parc des Buttes Chaumont. Il a déposé plainte.

    Mais quelle protection peut-on espérer de la part d’un gouvernement dont le ministre de l’intérieur, Manuel Valls – en charge de la police – a promis de trouver les moyens de faire taire Dieudonné ?

    Cette affaire est importante mais il est pratiquement certain qu’elle ne sera pas traitée correctement dans les médias hors de France – exactement comme elle n’est pas traitée correctement dans la presse française qui est la source de presque tout ce qui est rapporté à l’étranger. Les problèmes liés à la traduction, une part de malentendus et de contrevérités ajoutent à la confusion.


    Pourquoi le haïssent-ils ?


    Dieudonné M’Bala M’Bala est né dans la banlieue parisienne il y a 48 ans Sa mère était une blanche originaire de Bretagne, son père était un Africain originaire du Cameroun. Ce qui devrait faire de lui l’enfant-modèle du « multiculturalisme » que l’idéologie dominante de la gauche affirme promouvoir. Et durant la première partie de sa carrière, en duo avec son ami juif Elie Semoun, il était exactement ça : il faisait campagne contre le racisme, concentrant ses attaques sur le Front National allant même jusqu’à se présenter aux élections municipales contre une candidate du Front National à Dreux, une cité dortoir à environ 90 kilomètres à l’ouest de Paris où il réside. Comme les meilleurs humoristes, Dieudonné a toujours ciblé les événements de l’actualité, avec un engagement et une dignité peu courants dans la profession. Sa carrière était florissante, il jouait dans des films, était invité à la télévision et travaillait désormais en solo. Très bon observateur, il excelle dans des imitations assez subtiles de divers types de personnalités et groupes ethniques, des Africains aux Chinois.

    Il y a dix ans, le 1er décembre 2003, en tant qu’invité dans une émission de télévision traitant d’actualité intitulée « On ne peut pas plaire à tout le monde, » un nom tout à fait approprié, Dieudonné était arrivé sur le plateau sommairement déguisé en « converti au sionisme extrémiste », suggérant aux autres de « rejoindre l’axe du bien isaélo-américain. ». Cette mise en cause relativement modérée de « l’axe du mal » de George W. Bush semblait complètement dans l’air du temps. Ce sketch se terminait par un bref salut « Isra-heil ». On était loin du Dieudonné des débuts mais l’humoriste populaire avait été néanmoins salué avec enthousiasme par les autres comédiens tandis que le public présent sur le plateau lui avait fait une standing ovation. C’était dans la première année de l’attaque américaine contre l’Irak à laquelle la France avait refusé de s’associer, ce qui avait amené Washington à rebaptiser ce qu’on appelle là-bas « french fries » (belges en réalité) en « freedom fries » .

    Puis les protestations ont commencé à arriver, concernant particulièrement le geste final vu comme posant une équivalence entre Israël et l’Allemagne nazie.

    « Antisémitisme ! » criait-on même si la cible du sketch était Israël (et les Etats Unis et leurs alliés au Moyen Orient). Les appels se multipliaient pour interdire ses spectacles, le poursuivre en justice, détruire sa carrière. Dieudonné a essayé d’expliquer que son sketch ne visait pas les Juifs en tant que tels mais, à la différence d’autres avant lui, il n’a pas présenté d’excuses pour une offense qu’il considère ne pas avoir commise.Pourquoi n’y-a-t-il pas eu de protestations de la part des Africains dont il s’est moqué ? Ou des Musulmans, Ou des Chinois ? Pourquoi une seule communauté a-t-elle réagi avec autant de rage ?

    A commencé alors une décennie d’escalade. La LICRA entama une longue série d’actions en justice contre lui (« incitation à la haine raciale »), les perdant au début mais ne relâchant pas la pression. Au lieu de céder, après chaque attaque Dieudonné a poussé plus avant sa critique du « sionisme », Dans le même temps, Dieudonné était graduellement exclu des studios de télévision et traité comme un paria par les médias grand public. C’est seulement la profusion récente sur internet d’images montrant de jeunes gens en train de faire le geste de la quenelle qui a poussé l’establishment à conclure qu’une attaque frontale serait plus efficace que d’essayer de l’ignorer.


    L’arrière-plan idéologique


    Pour essayer de comprendre la signification de l’affaire Dieudonné, il est nécessaire d’appréhender le contexte idéologique. Pour des raisons trop complexes pour qu’on les présente ici, la gauche française – la gauche dont la préoccupation principale était autrefois le bien-être des travailleurs, l’égalité sociale, l’opposition aux guerres d’agression, la liberté d’expression – n’existe pratiquement plus. La droite a gagné la bataille décisive de l’économie avec le triomphe de politiques qui favorisent la stabilité monétaire et les intérêts du capital dfinancier international (le « néolibéralisme »). Comme prix de consolation, la gauche jouit d’une certaine prééminence idéologique basée sur l’anti-racisme, l’anti-nationalisme et l’engagement en faveur de l’Union Européenne – et même de l’hypothétique « Europe sociale » qui s’éloigne à grands pas pour rejoindre le cimetière des rêves disparus. En fait, cette idéologie coïncide parfaitement avec une mondialisation fondée sur les exigences du capitalisme financier international.

    En l’absence de toute véritable gauche sociale et économique, la France a sombré dans une sorte de « politique de l’identité » qui fait à la fois l’éloge du multiculturalisme et réagit avec véhémence contre le « communautarisme », c’est-à-dire l’affirmation de n’importe quel particularisme jugé indésirable. Mais certains particularismes ethniques sont encore moins les bienvenus que d’autres. Le voile islamique a été d’abord interdit dans les écoles, et les demandes pour le faire interdire dans l’espace public se font de plus en plus pressantes. Le niqab et la burqa, quoique rares, ont été interdits par une loi. Des controverses éclatent sur la nourriture halal dans les cantines, les prières sur la voie publique, tandis que des caricatures raillent régulièrement l’Islam. Quoi qu’on puisse penser de tout ça, la lutte contre le communautarisme peut être vue par certains comme dirigée contre une communauté en particulier. Dans le même temps, les dirigeants politiques français ont pris la tête de ceux qui appellent à la guerre dans des pays musulmans comme la Libye et la Syrie tout en affichant leur dévotion pour Israël.

    En même temps, une autre communauté fait l’objet d’une sollicitude de tous les instants. Ces vingt dernières années, alors que la pratique religieuse et l’engagement politique ont considérablement décliné, l’holocauste, appelé Shoah en France, est devenu progressivement une sorte de religion d’Etat. Les écoles commémorent la Shoah chaque année, elle domine de plus en plus dans une conscience historique en recul sous les autres aspects tout comme nombre d’approches en sciences humaines. En particulier, de tous les événements de la longue histoire de France, le seul protégé par une loi est la Shoah. La loi dite Gayssot prohibe tout questionnement sur l’histoire de la Shoah, une interférence absolument sans précédent avec la liberté d’expression. En outre, certaines associations comme la LICRA, se sont vues accorder le privilège de pouvoir poursuivre des individus en justice sur la base de « l’incitation à la haine raciale » (interprétée de manière très large et inégale) avec la possibilité d’encaisser des dommages et intérêts au nom de la « communauté insultée ». En pratique, ces lois servent surtout à poursuivre « l’antisémitisme » présumé et le « révisionnisme » par rapport à la Shoah. Même si elles sont souvent rejetées par les tribunaux, de telles actions en justice participent du harcèlement et de l’intimidation. La France est un des rares pays où le mouvement BDS (Boycott, Désinvestissement, Sanctions) contre la colonisation israélienne peut aussi être attaqué devant les tribunaux pour « incitation à la haine raciale. »

    Organisation violente, la Ligue de Défense Juive (LDJ), illégale aux Etats Unis et même en Israël, est connue pour avoir saccagé des librairies ou frappé des individus isolés, parfois âgés. Quand les agresseurs sont identifiés, la fuite en Israël est une bonne porte de sortie. Les victimes de la LDJ n’inspirent jamais dans l’opinion publique quoi que ce soit de comparable à l’indignation publique massive quand un citoyen juif est victime d’une agression gratuite. Par ailleurs, les politiciens se rendent au dîner annuel du CRIF avec le même zèle que ceux des Etats Unis pour aller au dîner de l’AIPAC -pas pour financer leurs campagnes électorales mais pour prouver la bienveillance de leurs sentiments.

    La France possède la plus importante communauté juive d’Europe occidentale, une population qui a en grande majorité échappé à la déportation pendant l’occupation allemande au cours de laquelle les immigrés juifs avaient été expulsés vers les camps de concentration. En plus d’une communauté juive établie depuis très longtemps, il y a beaucoup de nouveaux venus originaires d’Afrique du Nord. Tout cela contribue à une population aux succès très dynamiques, très présente dans les professions les plus visibles et les plus populaires (le journalisme, le show business ainsi que la science et la médecine entre autres).

    De tous les partis politiques français, le Parti Socialiste (en particulier via le Parti Travailliste de Shimon Peres qui est membre de l’Internationale Socialiste) est celui qui a les liens historiques les plus étroits avec Israël. Dans les années 1950, quand la France combattait le mouvement de libération nationale algérien, le gouvernement français (via Peres) avait contribué au projet israélien de production d’armes atomiques. Aujourd’hui, ce n’est pas le Parti Travailliste qui gouverne Israël mais l’extrême droite. La récente visite amicale faite par Hollande à Benjamin Netanyahou a montré que la dérive droitière de la vie politique en Israël n’a absolument pas tendu les relations – qui semblent plus étroites que jamais.

    Il n’empêche que la communauté juive est très petite en comparaison du grand nombre d’immigrés arabes venus d’Afrique du Nord ou des immigrés noirs originaires des anciennes colonies françaises en Afrique. Il y a quelques années, Pascal Boniface, un intellectuel de renom membre du PS, avait prudemment averti les dirigeants du parti que leur biais en faveur de la communauté juive pourrait finir par causer des problèmes électoraux. Cet avertissement qui figurait dans un document d’analyse politique avait provoqué un tollé qui lui avait presque coûté sa carrière.

    Mais le fait demeure : il n’est guère difficile pour les français d’origine arabe ou africaine d’avoir le sentiment que le « communautarisme » qui a vraiment de l’influence est le communautarisme juif.


    Les usages politiques de l’holocauste


    Norman Finkelstein a montré il y a quelques temps que l’holocauste peut être exploité à des fins pour le moins dénuées de noblesse : comme extorquer des fonds à des banques suisses. La situation en France est cependant très différente. Il ne fait guère de doute que les rappels constants de la Shoah fonctionnent comme une sorte de protection pour Israël contre l’hostilité que génère le traitement infligé aux palestiniens. Mais la religion de l’holocauste a un autre impact politique plus profond qui n’a pas de relation directe avec le destin des Juifs.

    Plus que toute autre chose, Auschwitz a été interprété en tant que symbole de ce à quoi mène le nationalisme. La référence à Auschwitz a servi à donner mauvaise conscience à l’Europe, et notamment aux Français si on tient compte du fait que leur rôle relativement marginal dans cette affaire [Auschwitz] avait été une conséquence de la défaite militaire et de l’occupation du pays par l’Allemagne nazie. Bernard-Henri Lévy, l’écrivain dont l’influence s’est accrue dans des proportions grotesques ces dernières années (il a poussé la président Sarkozy à la guerre contre la Libye), avait commencé sa carrière en soutenant que le « fascisme » est l’authentique « idéologie française ». Culpabilité, culpabilité, culpabilité. En faisant d’Auschwitz l’événement le plus significatif de l’histoire contemporaine, un certain nombre d’écrivains et de personnages publics justifient par défaut le pouvoir croissant de l’Union Européenne en tant que remplacement indispensable des nations européennes intrinsèquement « mauvaises. » Plus jamais Auschwitz ! Dissoudre les Etats nations dans une bureaucratie technocratique libérée de l’influence émotionnelle de citoyens qui pourraient ne pas voter correctement. Vous vous sentez français ? Ou allemand ? Vous devirez en éprouver de la culpabilité – à cause d’Auschwitz.

    Les Européens sont de moins en moins enthousiastes devant l’UE car elle ruine leurs économies et leur retire tout contrôle démocratique sur elles. Ils peuvent voter pour le mariage gay, mais pas pour la moindre mesure keynésienne et encore moins socialiste. La culpabilité pour le passé est néanmoins supposée maintenir leur fidélité à l’égard du rêve européen. Les fans de Dieudonné, si on en juge par les photos, semblent être en majorité des hommes jeunes, âgés entre 20 et 30 ans. Ils sont nés deux bonnes générations après la seconde guerre mondiale. Ils ont passé leurs vies à entendre parler de la Shoah. Plus de 300 écoles parisiennes arborent une plaque commémorant le sort funeste d’enfants juifs déportés dans les camps de concentration nazis. Quel peut bien être l’effet de tout ça ? Pour beaucoup de ceux qui sont nés longtemps après ces terribles événements, il semble que tout le monde est supposé se sentir coupable – si ce n’est pas pour ce qu’ils n’ont pas fait, alors c’est pour ce qu’ils auraient été supposés avoir fait s’ils en avaient eu la possibilité [s’ils avaient vécu à l’époque, NdT].

    Quand Dieudonné a transformé Chaud Cacao, une vielle chanson « tropicale » un peu raciste, en Shoah Ananas, le refrain a été repris en masse par les fans de Dieudonné. J’ose croire qu’ils ne se moquent pas de la véritable Shoah mais plutôt de ceux qui leur rappellent tout le temps des événements qui sont supposés les faire se sentir coupables, insignifiants et impuissants. Une bonne partie de cette génération en a assez d’entendre parler de la période 1939 – 1945 alors que son propre avenir est sombre.


    Personne ne sait quand s’arrêter


    Dimanche dernier, Nicolas Anelka, un footballeur très connu d’origine afro-belge [la famille d’Anelka est en fait originaire des Antilles, NdT] qui évolue en Angleterre a fait une quenelle après avoir marqué un but – en signe de solidarité avec son ami Dieudonné M’Bala M’Bala. Suite à ce geste simple et à la base insignifiant, le tumulte a atteint de nouveaux sommets.

    A l’Assemblée Nationale française, Meyer Habib représente les « Français de l’étranger » – dont 4 000 Israéliens d’origine française [plus de 78 000 inscrits sur les registres électoraux en réalité, NdT]. Lundi dernier, il a twitté « La quenelle d’Anelka est intolérable ! Je vais déposer une proposition de loi pour punir ce nouveau salut nazi pratiqué par les antisémites. »

    La France a adopté des lois pour « punir l’antisémitisme ». Le résultat est à l’opposé. De telles dispositions tendent simplement à confirmer la vieille idée selon laquelle « les juifs dirigent le pays » et participent à la montée de l’antisémitisme. Quand de jeunes français voient un Franco-israélien essayer de transformer en délit un simple geste, quand la communauté juive se mobilise pour interdire leur humoriste préféré, cela ne peut que faire monter l’antisémitisme et même encore plus rapidement.

    Il reste que dans cette escalade le rapport de forces est très inégal. Un humoriste n’a pour armes que des mots et des fans qui pourraient bien se disperser quand la situation va se corser. De l’autre côté se trouvent l’idéologie dominante et le pouvoir de l’Etat.

    Dans ce genre de conflit, la paix civile dépend de la sagesse et de la capacité de ceux qui ont le plus de pouvoir à faire montre de retenue. S’ils n’agissent pas en ce sens, alors cela pourrait être un jeu sans vainqueurs.


    Diana Johnstone


    Counter Punch (USA), 1er janvier 2014
    Traduit de l’anglais par Djazaïri

    Source :
    http://mounadil.wordpress.com/2014/01/02/la-campagne-contre-dieudonne-vue-par-diana-johnstone-pour-le-magazine-americain-counter-punch/

    Article en anglais :
    http://www.counterpunch.org/2014/01/01/the-bete-noire-of-the-french-establishment/

    Publié par : http://www.silviacattori.net


     

    Dieudonné et Tony Parker
    Tony Parker et Dieudonné font une "quenelle'

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