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    http://www.les-crises.fr/tag/brics/
    Laissez-moi vous présenter l’organisation la plus puissante aujourd’hui, dont presque personne n’a entendu parler. Mais c’est pour bientôt !

    Le réel pouvoir fondateur derrière les BRICS.

    Les BRICS, comme nous l’avons déjà traité par ailleurs, ont été formés en réponse à la fraude financière et aux malversations occidentales. Son plus grand objectif est de donner à l’Orient une véritable impulsion dans des domaines comme le commerce, les mesures de sécurité et la coopération économique, le tout au sein d’un cercle qu’eux seuls, et non Washington, peuvent contrôler.

    Ils ont parcouru un long chemin en un court laps de temps, c’est vrai, mais ils sont encore « les petits nouveaux du quartier ». En fait, ils ne se sont même pas conceptualisés en tant qu’idée sérieuse avant Septembre 2006 ! Leur première rencontre officielle, sans l’Afrique du Sud, n’a été tenue qu’en 2009.


    Cependant, il y a une autre organisation qui est apparue avant les BRICS et qui est encore plus influente qu’eux en quelque sorte! Une organisation dont les fondateurs ont fait naître en premier l’idée ouvertement pro-marchés émergents, tout comme les BRICS.


    Cette organisation dont presque personne ne parle, est appelée l’ « Organisation de Coopération de Shanghai » (OCS).


    Je vous avais dit que presque personne n’en parle! Laissez-moi vous présenter l’organisation la plus puissante aujourd’hui dont presque personne n’a entendu parler. Mais c’est pour bientôt!


    L’histoire derrière sa fondation


    Tout d’abord, l’OCS s’ést établi avant les BRICS, en fait, leurs fondations ont été posées une décennie plus tôt, en 1996. Le but de l’OCS est un peu différent de celui des BRICS, toutefois ils ont de nombreux objectifs parallèles. Tout d’abord, la création de l’OCS est l’idée d’une alliance partielle entre deux pays, la Russie et la Chine.


    Pourquoi alors ont-ils été créés ?


    Mes frères, c’est la vraie question. Afin de bien mettre nos têtes au clair sur ce sujet, faisons un rapide récapitulatif de l’histoire.


    Au tout début des années 1990, lorsque l’Union Soviétique avait pratiquement perdu la guerre froide, de nombreuses garanties et traités ont été acceptés et signés, entre Gorbatchev et les États-Unis. L’un des principes directeurs était que la Russie accepte, afin de faire disparaitre pacifiquement l’Union Soviétique, que la nouvelle Allemagne Ouest et Est réunis, adhère à l’OTAN. Cependant, tout aussi important, en retour, la garantie avait été donnée au Ministre des Affaires Étrangères soviétique, Edouard Chevardnadze, que l’OTAN (une force militaire de dissuasion créée comme un contrepoids pour surveiller les forces soviétiques en Europe), n’utilise, en aucun cas, l’Allemagne pour faire un « saute mouton » et étendre sa composition plus à l’Est.


    C’était un accord des plus raisonnable, et il constituait la base d’une grande paix … une paix qui aurait pu durer indéfiniment sans l’orgueil et l’arrogance de l’Ouest et des « banksters » mondialistes qui se sont hissés à sa tête. En fait, tout bêtement, le Dragon de la Banque a immédiatement commencé à revenir sur cette promesse fondamentale faite à la Russie, et a commencé à bâtir des plans pour étendre son alliance militaire de l’OTAN vers l’Est, vers le territoire russe.


    La toute première admission publique faite par les mondialistes, montrant qu’ils visaient à rompre leurs promesses sur l’expansion de l’OTAN vers la Russie, fût faite par le président Clinton, en faisant un demi-tour complet en 1996. Par ailleurs, si vous vous souvenez, 1996 fût exactement l’année durant laquelle le groupe, qui deviendra l’OCS, a été formé (ce n’est pas une coïncidence).


    « Wile E. Brzezinski », Kissinger, et tous les magouilleurs de l’OTAN, ont immédiatement commencé à mettre leurs promesses dans la corbeille à papier! Dans tous les sens, et aussi vers l’Est, ils ont distribué des cartes d’adhérents à l’OTAN, à tout le monde et même à leurs animaux de compagnie!


    La Hongrie, la République tchèque, la Pologne et même d’anciens satellites soviétiques, comme les pays baltes, ont été admis. Plutôt que de tenir leur promesse de ne pas étendre l’OTAN, ils ont carrément doublé le nombre d’adhérents, passant de 12 à 24 États! A l’heure actuelle, ils sont 28 membres. Ils sont même allés jusqu’à mettre quelques bases navales en Asie centrale.


    Le principe élémentaire des ces traités a été violé, et Washington DC s’est mit en mouvement pour encercler militairement la Russie, pour mettre des « systèmes de défense antimissile » en place autour de leurs frontières. Tout cela a été accompli au cours d’une planification de pivot vers l’Asie, et même d’un déplacement vers les républiques d’Asie centrale. Le pouvoir vacant que l’Empire Soviétique en ruine avait laissé, allait bientôt être comblé par Brzezinski et les mondialistes occidentaux.


    Quelque chose devait être fait pour contenir les agressions des États-Unis et de l’OTAN, et rapidement.


    L’Orient Répond


    La Russie et la Chine savaient ce que signifiait l’annonce du président Clinton sur les nouvelles adhésions à l’OTAN, et se sont immédiatement mis au travail. Dans la même année, ils ont mit en place une organisation, dans la ville de Shanghai, connue sous le nom de « Shanghai Five », car il avait cinq États membres à ses débuts. Plus tard, en 2001, avec l’admission de l’Ouzbékistan, il a été rebaptisé l’Organisation de Coopération de Shanghai.


    Jetons un coup d’œil à la brève description que Wikipédia lui donne dans leur introduction: L’OCS est une organisation politique, économique et militaire eurasienne qui a été fondée à Shanghai par les dirigeants de la Chine, du Kazakhstan, du Kirghizistan, de la Russie et du Tadjikistan.


    Arrêtons nous là un moment. Rappelez-vous les pays que nous avons examinés et que « Wile E. Brzezinski » avait désigné dans « Le Grand Échiquier » comme clés pour contrôler l’Eurasie? Oui, il s’agissait de l’Ouzbékistan, du Tadjikistan et du Turkménistan, etc. Il semble que la Russie et la Chine avaient un accord avec M. Brzezinski, sur la question de leur importance stratégique, parce que, dès l’instant où ils ont su que les promesses de l’OTAN étaient nulles et non avenues, ils ont commencé à bouger pour fermer l’Ouest par ce couloir particulier de façon définitive.


    Ses six États membres couvrent 60% de la masse continentale de l’Eurasie, sans oublier de mentionner qu’ils représentent l’énorme quart de la population mondiale! Voici leur logo, mettant en avant l’immense territoire que couvre leur composition: (photo du logo)


    Cependant, si vous incluez les plusieurs États «observateurs», qui sont en lice pour une adhésion officielle, alors tous ceux qui sont affiliés à cette organisation comprendraient pas moins de 50% de la population mondiale!


    Rappelez-vous la carte de l’Eurasie que nous avions examiné? Jetons-y un second coup d’œil:(photo carte 1)




    Ok, maintenant jetons un coup d’œil à la liste des pays inclus dans l’OCS (soit comme membres, observateurs ou partenaires de dialogue):(photo carte 2)


    Eh bien, bénissez-moi, si tout ceci n’avait pas été préparé de longue date! Les seules parties ignorées sont l’Asie du Sud, le Caucase, le monde arabe et l’Europe! Presque tout le monde en Asie centrale et méridionale est soit un membre, soit un «observateur» en l’état actuel des choses!

    Parlons des «observateurs» …


    L’adhésion à l’OCS


    Une nation ne peut pas simplement décider de rejoindre l’OCS. Ce n’est pas comme cela que ça fonctionne. L’OCS soumet un candidat à un processus de «filtrage» avant de l’accepter comme nouveau membre.


    La première étape pour devenir un membre, traditionnellement, est de demander le « statut d’observateur ». Ensuite les membres tiennent une série de réunions de dialogue avec le demandeur, afin de déterminer si l’application de la nation serait un ajout positif au groupe. Le test décisif pour l’adhésion semble consister à savoir si l’application de la nation répondrait à quelque chose appelé « L’esprit de Shanghai ».


    Dans leurs propres mots, pour satisfaire à « L’esprit de Shanghai », une nation candidate doit remplir ces caractéristiques : la confiance mutuelle, les avantages réciproques, l’égalité, la consultation, le respect de la diversité culturelle et la poursuite du développement commun.


    Si un candidat ne peut pas répondre à la plupart ou la totalité de ces choses, il ne fait pas l’affaire. Afin d’être approuvé au « statut d’observateur », chacun des six pays membres doit vous donner le feu vert. Si le Tadjikistan pense que vous seriez un préjudice pour le groupe, alors ce que pensent la Chine et la Russie n’a pas d’importance: vous ne faites pas l’affaire! Il doit y avoir un accord unanime pour qu’un nouveau membre rejoigne les rangs.


    La stratégie la plus évidente pour les États-Unis et l’OTAN ne serait-elle pas tout simplement de détruire cette nouvelle organisation de l’intérieur? Pourquoi ne rejoignent-ils pas tout simplement l’OCS, afin de contrecarrer toutes ses voix?


    Les États-Unis ont déjà demandé le « statut d’observateur » à l’OCS! En fait, ils ont demandé il y a près d’une décennie, en 2006, et on leur a répondu « merci, mais non merci ».


    Cela devrait cimenter, dans l’esprit de chacun, à quel point ils sont retranchés contre Washington et les élites occidentales.


    Une organisation militaire


    Toutefois, au cas où vous seriez tentés de penser que l’OCS est juste un groupe de gars « sympathiques », qui chantent « Kumbaya », et applique de la cire sur des propos de solidarité, de coopération et de commerce, détrompez-vous! Ne l’oublions pas, l’OCS n’est pas un « tigre de papier ». D’ailleurs, l’OCS a toujours été prévu pour des questions militaires depuis le début. Après tout, il a été construit pour offrir la sécurité aux frontières de ses États membres, à la fois contre le terrorisme et contre toute tentative de placer des systèmes de missiles autour de leur périphérie. C’était une réponse directe à l’empiètement de l’OTAN vers les frontières de la Russie.


    En fait, durant leur dernière réunion en Septembre, ils ont réaffirmé leur position catégorique à propos de tels comportements : « le renforcement unilatéral et illimité du système de défense antimissile par un quelconque État ou groupe d’états nuirait à la sécurité internationale et à la stabilité stratégique ».

    Ils disent clairement à la fois à Washington et à l’OTAN, que de tenter de rajouter des systèmes de défense antimissile, serait considéré comme une menace directe à leur stabilité et à leur sécurité.


    Mais, ils ne se sont pas contentés de simplement dire aux banquiers occidentaux de faire marche arrière, ils ont commencé à organiser certains exercices de guerre assez impressionnants. En fait, l’an dernier, ils ont tenu conjointement un exercice anti-terroriste qui a impliqué plus de 7000 soldats.

    Comme vous pouvez le voir, ils ont clairement évolués du stade de « renforcement de la confiance » des premiers jours, vers une alliance militaire assurée et hautement synchronisée. Laquelle est capable de répondre rapidement aux menaces internes ou externes.


    Le dernier recours des « banksters »


    Cela a eu pour effet de terrifier les banksters. Après tout, leur truc habituel, depuis des siècles, a toujours été de «diviser pour régner». Ils ont été maîtres en la matière pour retourner les peuples et les nations les uns contre les autres, de sorte qu’ils puissent les manipuler et les contrôler, mais cette tactique « d’empêcher les barbares de se rassembler », à l’évidence ne fonctionne plus.


    Puisque le pouvoir militaro/bancaire anglo-américain ne va sûrement pas s’en aller gentiment, ils se trouvent concrètement face à une seule option: essayer d’attirer l’un d’eux dans une guerre, avant que les concurrents arrivistes (OCS, BRICS, Eurasian Economic Alliance) ne puissent complètement se fondre ensemble. Si vous regardez tout autour, c’est exactement ce que vous verrez.


    En essayant de lancer inutilement une guerre contre l’Iran (qui a le «statut d’observateur» à l’OCS), de renverser le gouvernement de l’Ukraine, et de tenter d’attirer la Russie dans une guerre dans la région du Dombass séparatiste, les États-Unis et Londres ont tenté d’entraver tout nouveau progrès de cette alliance résolument anti-dollar, anti-OTAN et anti-FMI.


    Par ailleurs, en 2014, l’OCS a décidé de ne pas ajouter de nouveaux membres pour l’instant, bien qu’elles devaient le faire. La raison est que l’OCS pensait que le fait que les banksters tentent d’attirer la Russie dans la guerre en Ukraine était si grave, que la majeure partie de la réunion de Septembre 2014 a porté sur l’élaboration d’un accord de paix sur cette situation.


    En vérité, si vous voulez connaître les forces réelles derrière l’accord de Minsk, ne cherchez pas plus loin qu’un effort conjoint du Kremlin et l’OCS.


    La tentative de mettre l’Ukraine toute entière hors des sentiers du commerce eurasien, n’a été que partiellement réussie. Après tout, l’Occident a perdu la Crimée, et à ce jour, a perdu le Dombass également. Cet échec à prendre la base navale russe de la mer noire, et à attirer la Russie dans un engagement, a fait grincer les dents de Wile E. Brzezinski et de ses marionnettistes mondialistes. Si vous ne me croyez pas, il suffit d’écouter cette interview avec le « coyote » lui-même (https://www.youtube.com/watch?v=IrRPZ6CBvPw). Il est plus bouleversé que je ne l’ai jamais vu, et il a pourtant donné beaucoup d’interviews au cours des 6 derniers mois.


    Conclusion


    « Wile E. Brzezinski » et les puissants « banksters » occidentaux sont désespérés et paniqués , en regardant, impuissants, leur plus grande crainte se dérouler devant eux. Une alliance eurasienne viable est en train de devenir réalité.


    Dans cette nouvelle réalité, leurs anciens mécanismes de contrôle (le prêt à intérêt et l’esclavage par la dette du FMI et de la Banque Mondiale, ainsi que les incursions de « sécurité » des États-Unis et de l’OTAN) seront à la fois importuns et sans pertinence.


    Le monde ne veut plus de leurs « services » voyous. Après tout, ils peuvent subvenir à leur propre sécurité!


    Le monde n’a jamais eu besoin de cette drogue dette/monnaie des banksters, et grâce à la Banque des BRICS et d’autres mécanismes, ils vont bientôt avoir tout le capital dont ils ont besoin pour s’attaquer à leurs défis, libéré du contrôle de la Banque Dragon.


    Les BRICS ont un énorme pouvoir, mais ils ont toujours été l’extension économique d’une précédente alliance militaro/sécuritaire, l’OCS. Jusqu’à ce point, l’OCS a préféré que les BRICS soient le visage public de l’alternative à la domination occidentale, mais l’OCS cherche à commencer à monter sur le devant de la scène, aux côtés des BRICS.


    Tout cela conduit à des conjectures concernant une information récente qui a fait l’effet d’une bombe.


    Est-ce que quelqu’un d’autre se souvient de l’annulation du South Stream, le gazoduc qui devait s’écouler à travers la Bulgarie et en Europe?


    Qui est désormais le principal bénéficiaire de ce pipeline de gaz naturel à la place de l’Europe ?


    La Turquie, un «observateur» de l’OCS, et (dans mon esprit) le joueur asiatique clé, pas encore totalement admis à bord. L’Eurasie ne peut pas bien fonctionner sans ce pays « passerelle » qu’est la Turquie.


    L’abandon du South Stream à travers l’Europe est une énorme affaire, et cela m’amène à me demander: est-ce le prix à payer pour convaincre la Turquie (également membre-clé asiatique de l’OTAN) de changer de camp d’Ouest en Est? Seront-ils bientôt l’État surprise, qui passera de pays «observateur» de l’OCS, à membre à part entière au vote en 2015?


    En outre, s’il devait rejoindre pleinement l’OCS, deviendrait-il le premier grand membre de l’OTAN … à quitter l’OTAN?



    Cependant, qu’il soit inclus parmi les membres en 2015 ou non, une chose est certaine, ces nouvelles organisations de l’Eurasie sont en train de changer l’histoire si vite, que cela dépasse l’entendement. Le 21ème siècle ne ressemblera en rien à ses prédécesseurs. L’Asie (et progressivement l’Europe) semble être désireux de créer un monde nouveau, libéré des banksters « US/UK » et de leur contrôle militaire.


    A quoi ressemblera la terre, une fois que tout le monde se sera rendu compte que la «nation indispensable» a toujours été complètement dispensable?


    Enfin, qu’arrivera-t-il au dollar américain, et à ceux dont la richesse repose sur lui, une fois que cette nouvelle puissance mondiale sera prête à l’abandonner entièrement (comme ils le feront très certainement)?


    Depuis plus d’un siècle, les banques occidentales ont volé la richesse et le destin des plus anciens, des dynasties de l’Est, et maintenant les peuples et les pouvoirs qui y sont situés, ont formé un partenariat aux dents solides pour une coopération sur leurs intérêts communs.


    Désolé « Wile E. Brzezinski » et les amis mondialistes mais votre rêve de garder l’Eurasie divisée et sous votre pouce est bouleversé !


    Par ailleurs, à toute personne détenant toujours follement la majorité de leur richesse dans l’instrument « has-been » de la dette appelé le dollar américain (dont l’Orient se déleste complètement) … Je vous suggère d’y remédier avant la fin de ce dessin animé, et le petit cochon dit:
     
    Traduction : Rochelle Cohen
     
     

     


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    15 Novembre 2014
    La Russie lance un nouveau système de paiement pour contourner le réseau Swift

    Independance day

     

    La Russie lance un nouveau système de paiement pour contourner le réseau Swift 

    De nombreux observateurs se sont réjouis à propos de ce qu’ils décrivent comme des efforts pour briser l’hégémonie du dollar, par exemple l’effort commun des pays dits du BRICS pour créer une banque de développement. Mais, autant c’est important de disposer d’une série d’entités de financement internationales, en particulier d’entités axées sur les activités qui (en théorie) accroissent les avantages collectifs de s’appuyer sur une monnaie de réserve…. autant il ne suffit pas de lancer de nouvelles institutions de financement utiles pour briser la domination du dollar.

    Bien que l’abus par les US de leur position d’émetteur de la monnaie de réserve soit clairement perçu, aucun concurrent n’attend dans les coulisses [pour prendre leur place]. La zone euro a raté l’occasion, par son incapacité à assainir des banques encore plus malades qu’aux États-Unis, et en créant de mauvaises conditions, par son adhésion à des politiques d’austérité destructrices. La Chine a clairement le potentiel pour destituer les États-Unis à long terme, mais elle n’est pas disposée à encourir les déficits commerciaux nécessaires, car cela signifie exporter de la demande et donc des emplois. Et aucun pays n’a encore fait la transition d’une position d’exportateur vers une situation économique tirée par la consommation. Une crise ou un malaise prolongé retarderaient également la Chine dans ses efforts pour déloger les États-Unis de leur position de devise dominante.

    Mais même si  les pays que les États-Unis tentent de punir, en utilisant leur influence sur le système des paiements internationaux, ne seront pas en mesure de se débarrasser du dollar avant longtemps, cela ne signifie pas qu’ils ne trouveront pas d’échappatoires à plus court terme. La Russie est devenue l’ennemi numéro un de l’Amérique et la cible de sanctions économiques de plus en plus strictes, apparemment pour avoir pêché en intercédant en Syrie (alors que le Congrès est fermement opposé à une action militaire), pour s’être opposée avec succès au coup d’État soutenu par les USA en Ukraine, pour avoir collaboré avec l’Iran, et pour avoir hébergé Edward Snowden. Les sanctions qui font vraiment mal sont celles qui visent les banques russes ayant des expositions en devises étrangères, ainsi que celles ayant utilisé les marchés de capitaux étrangers pour émettre de la dette et des titres.

    La Russie a annoncé aujourd’hui [12 novembre] qu’elle prévoit de lancer un nouveau système de paiements, de sorte qu’elle n’aura plus besoin d’utiliser le système de paiements Swift (Society for Worldwide Interbank Financial Telecommunication) .

    De Russia Today [1] :

    « La Russie entend avoir son propre système interbancaire international opérationnel en mai 2015. La Banque centrale de Russie dit qu’elle doit accélérer les préparatifs pour sa version de Swift en cas de « défis » possibles de l’Ouest.

    « Compte tenu des défis, la Banque centrale de Russie crée son propre système de transmission de messagerie financière … Il est temps de se presser, donc dans les prochains mois, nous aurons terminé  certaines tâches. L’ensemble du projet de transmission de messages financiers sera achevé en mai 2015″, a déclaré Ramilya Kanafina, chef adjoint du département national du système de paiement à la Banque centrale de Russie .

    Les appels à ne plus utiliser le système Swift dans les banques russes ont commencé à être plus pressants, à mesure que les relations entre la Russie et l’Occident se sont détériorées, après les sanctions. Jusqu’à présent, les responsables de Swift disent que, malgré la pression de certains pays occidentaux à rejoindre les sanctions anti-russes, il n’ont pas l’intention de le faire…

    Swift est actuellement l’une des principales connexions de la Russie au système bancaire international, et pourrait, s’il est désactivé, nuire à l’économie russe à court terme. Globalement, ce réseau transmet des ordres de transactions d’une valeur supérieure  à 6 000 milliards de dollars, et implique plus de 10 000 institutions financières dans 210 pays. Selon le statut de Swift, le système a des groupes nationaux de membres et d’ utilisateurs dans chaque pays. En Russie, c’est ROSSwift,  la deuxième plus grande association mondiale Swift après les États-Unis. »

    Je me réjouis des commentaires de lecteurs, mais je crois qu’il y a deux questions ici.

    La première question est que, même si Swift est encore ouvert pour les affaires avec la Russie, il pourrait être coupé à une date ultérieure. Il ne peut pas avoir échappé à l’attention de Moscou que la Banque centrale d’Iran et la plupart des autres grandes banques de ce pays ont été interdits d’accès à Swift en 2012. Du Wall Street Journal [2] :

    « L’Union européenne a déclaré qu’elle interdisait tout type de transactions avec les entreprises financières iraniennes sur la liste noire, mais les décideurs américains ont clairement déclaré qu’ils allaient maintenir la pression pour une action plus large.

    La Société Swift, basée en Belgique et utilisée par la plupart des grandes banques du monde, a déclaré qu’elle se conformerait à l’ordre de l’Union européenne.

    L’interdiction s’applique uniquement aux banques iraniennes que l’Union européenne a mises sur une liste noire de sanctions. Elle concerne la Banque centrale d’Iran et plus d’une douzaine d’autres firmes.

    Le Congrès américain, quant à lui, demande l’arrêt des transactions avec toutes les banques iraniennes, et menace de sanctions contre l’administration et les dirigeants de Swift, s’ils ne coupent pas tous les liens avec le secteur financier de l’Iran. Les législateurs américains affirment que l’Iran est en train de transférer le financement de son programme nucléaire sur des banques non sanctionnées. »

    La seconde question est que la création d’un canal de paiements Swift extérieur peut permettre à la Russie de mettre en place un système financier pour ceux qui ne veulent pas être soumis aux diktats américains.Les banques qui ont fait des affaires avec l’Iran, à la fois avant et après les sanctions de Swift, ont été frappées par des sanctions de blanchiment d’argent. Les paiements étaient des paiements en dollars et ont été compensés dans les succursales des banques à New York, les soumettant ainsi à la loi américaine. Toutes les transactions en dollars entre les banques sont réglées à la fin de la journée à New York. Les systèmes de paiement interbancaires dépendent en définitive du filet de sécurité de la banque centrale, et de nombreuses transactions importantes passent par Fedwire, le système interbancaire de la Fed. Donc, il n’y a aucun moyen technique de contourner ce problème, au moins maintenant. Benjamin Lawsky, le surintendant des services financiers de New York, a menacé de retirer sa licence à la succursale de New York au première mécréant qu’il rencontrerait.

    Les régulateurs fédéraux et britanniques ont été outrés par son comportement [3], mais les régulateurs fédéraux ont rapidement reconnu que Lawsky leur avait fait une énorme faveur. Il a considérablement fait monter les enchères, quand ils ont poursuivi les banques étrangères qui défiaient les États-Unis en faisant des affaires, grâce à des systèmes de paiement des États-Unis, avec les pays étrangers sur la liste noire. En 2012, Lawsky a imposé une amende de 340 millions de dollars à la banque Standard Chartered, à quoi se sont ajoutées des amendes fédérales pour un montant supplémentaire de 327 millions de dollars. Aussi stupéfiant que ce montant pouvait être jugé à l’époque, il pâlit à côté de 8,9 milliards de dollars d’amendes exigées de BNP Paribas [4], en plus des accusations criminelles. (Lawsky a également frappé Standard Chartered d’une amende de 300 millions de dollars [5] en août pour la poursuite de ses comportements non conformes).

    Mais de nombreuses banques étrangères, et même des organismes de réglementation étrangers, ont été indignés par l’ampleur des amendes imposées aux États-Unis pour blanchiment d’argent, (comme c’est le cas dans l’utilisation du système de paiements des États-Unis pour effectuer des transactions avec les contreparties interdites). Journaux et hommes politiques français hurlaient sur la pénalité de 8,9 milliards de dollars contre BNP Paribas. Si le système de paiement russe fonctionne (comme il sera censé être à l’épreuve de la NSA, vous pouvez être certain que les États-Unis utiliseront leurs meilleurs talents de piratage contre lui), il permettra aux banques comme BNP Paribas et Standard Chartered de traiter avec l’Iran. Cela leur ferait probablement un plaisir immense d’obtenir un peu de revanche sur les États-Unis de cette façon là.

    En outre, il y a certainement des entreprises en Europe qui ne sont pas ravies de devoir se conformer aux sanctions de l’Union européenne contre la Russie, quand ces sanctions mettent en péril leurs activités. On ne sait pas clairement combien d’entre elles seraient prêtes à défier les sanctions, mais le traitement des transactions grâce à un système de paiement sous contrôle russe serait beaucoup moins sensible à la détection que via Swift.

    En d’autres termes, cette mesure se présente comme une arme pour réduire l’efficacité de l’utilisation de la domination du dollar dans les paiements. Que les Russes puissent lancer un système suffisamment robuste rapidement est une question ouverte, mais c’est une mesure défensive judicieuse et potentiellement une mesure offensive. Ce système peut avoir des ramifications à long terme, si d’autres pays mécontents des États-Unis décident de l’employer pour des raisons pratiques ou politiques. Restez à l’écoute.


    Traduit par Jean-Jacques pour vineyardsaker.fr

    Notes

    [1] Russia to launch alternative to Swift (RT,anglais, 11/11/2014)

    [2] Swift to Cut Ties With Iran Banks After UE Ban (The Wall Street Journal, anglais, 15/03/2012)

    [3]Les régulateurs…outrés par son comportement (naked capitalism,anglais,10/08/2012)

    [4] pénalité de $ 8,9 milliards contre BNP Paribas (naked capitalism, anglais, 12/07/2014)

    [5] Standard Chartered frappé d’une amende de 300 millions de dollars ( naked capitalism, anglais, 13/11/2014)

    Source : Russia to Launch New Payments System to Circumvent Swift Network (nakedcapitalism.com, anglais, 12/11/2014

    Source

    http://www.wikistrike.com/2014/11/la-russie-lance-un-nouveau-systeme-de-paiement-pour-contourner-le-reseau-swift.html


    Tag(s) : #Economie


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    20 Mars 2014

    La crise grecque remet en cause l’usage de la monnaie…

     

     

    Après cinq ans de politiques d’austérité, de plans de redressement, de subventions européennes, force est de constater que toutes les solutions classiques échouent à renflouer les finances de l’État grec. Que pouvons-nous attendre d’un pays capitaliste, sans capitaux et sans marché, doté d’usines sans commandes, de travailleurs sans salaires, de richesses sans usages ?...


    Les Grecs n’ont pour l’instant aucune issue politique possible, à droite comme à gauche. Les seuls à ne pas désespérer sont les quelques militants du “Plan B”. Leur leader, Alekos Alavanos propose une sortie de l’Europe et de l’euro, le retour à la drachme suivi d’une dévaluation immédiate de 50%. Sachant que le Plan B ne bénéficie du soutien d’aucun journal, d’aucune radio, d’aucune télévision, tous ces médias étant aux mains de la finance, sachant que les retraites ont été divisées par deux, que 30% des actifs sont au chômage, que les impôts ont doublé en cinq ans, on peut comprendre que la perte d’une bonne moitié de ce qui reste ne soit pas une proposition bien attractive…


    En attendant, il faut bien continuer à manger, à se vêtir, à se soigner, à éduquer, à vivre. Fleurissent alors une quantité d’alternatives, suscitées par la nécessité bien plus que par une idéologie ou une élaboration intellectuelle, totalement hors du système marchand en faillite. Ces initiatives individuelles ou collectives n’opposent même pas une critique explicite et définitive du capitalisme. Elles répondent à une urgence, elles prouvent la créativité de l’instinct de survie, peut-être plus que les théories politiques. Sans le savoir encore, elles nous apportent la preuve qu’en situation de crise, la solution de la désargence émerge inévitablement. Il est possible, sans encore pouvoir en être certains, que la pratique de l’accès non marchand aux ressources, sans retour compensatoire, fera son chemin dans les esprits et que la Grèce, après nous avoir instillé l’idée de la démocratie, nous apportera maintenant l’idée d’une civilisation sans argent. Les quelques exemples suivants nous y incitent :


    Dans la petite ville de Katérini, le système de santé est en complète déliquescence (voir article du 16 janvier). Les malades chroniques (diabétiques, cancéreux, séropositifs, etc.) ne trouvent plus les médicaments vitaux pour eux, ni dans les pharmacies ni à l’hôpital. L’accidenté qui veut se faire soigner d’une blessure doit fournir lui-même les médicaments, les pansements, les cathéters nécessaires. Dans le même temps, des médicaments envoyés de France ou d’Allemagne restent inutilisés faute de pouvoir traduire les notices en grec. Les dates de péremption sont dépassées faute de lien entre les lieux de stockage et les prescripteurs… Un petit groupe de jeunes bénévoles participant à un centre social autogéré a résolu le problème en une journée, sans aucun moyen financier, sans intérêt personnel ni compétences particulières. Avec leurs ordinateurs personnels, ils ont mis en place un logiciel qui permette le suivi d’un médicament et de son usage, qui facilite l’anticipation de la pénurie comme de l’abondance, qui centralise toutes les données informatiques au niveau des fournisseurs, des praticiens, des patients, qui donne accès rapidement au produit demandé… En une journée, sans tambour ni trompette, une poignée de bénévoles ont fait ce que l’État n’a pu réaliser en dix ans, avec d’énormes moyens. La maîtrise des ressources et des usages est simple, pratique, économique et les bénévoles de Katerini nous le prouvent. Qui a dit que la désargence c’était l’inefficacité ?


     

    Au coeur d’Athènes se sont ouverts des magasins d’un genre nouveau. Ils servent de simples centres de distribution. N’importe qui peut y déposer ce dont il n’a plus l’usage, le produit qu’il ne pourra pas consommer, l’objet qu’il a fabriqué… N’importe qui peut y prendre ce dont il a besoin pour se nourrir, se vêtir, se distraire… Il n’y est pas question d’argent, ni d’échanges, pas même de don et de contre don. Tout y est anonyme et vous ne saurez pas à qui vous devez d’avoir obtenu le kilo de lentilles qui vous a mis l’eau à la bouche ou à qui votre CD de musique a fait tant plaisir. Dans ces magasins, il est impossible de dire ce qui vaut le plus, du kilo de lentilles qui nourrit ou du CD qui réjouit. Ces épiciers d’un autre genre se rendent-ils comptent à quel point ils sont révolutionnaires ?... A quel point ils remettent en question le profit, les hiérarchies de valeurs, la notion de classes… ? Les magasins Emmaüs vendent, les Restos du Cœur offrent, les friperies du Secours Populaire reçoivent les dons de généreux donateurs pour les redistribuer aux pauvres. Les magasins libres d’Athènes ne font rien de tout cela. Ce ne sont pas les miettes des riches qui tombent sur les pauvres. On ne demande pas au visiteur qui prend un objet s’il est chômeur ou SDF. Pourquoi prendrait-il inutilement un objet au risque d’en priver un autre qui en aurait besoin ? On ne remercie pas le nanti qui se débarrasse du manteau de trop puisqu’il en est soulagé. Le SDF qui va le porter n’a pas de gratitude à exprimer puisqu’il n’y a pas de don mais une place gagnée dans une armoire.

     

    Qui a dit que la désargence c’était le don ou le troc ?


    Ailleurs, une sorte de Diogène devient célèbre dans un quartier populaire. Vieux et sans famille, il s’est trouvé un bon moyen de se tisser les relations humaines qui lui manquaient. Il glane de-ci-de-là de quoi remplir une grande gamelle qu’il fait chauffer sur le trottoir et invite le passant à partager son repas. Certains viennent animer la cantine avec un accordéon ou un bouzouki, d’autres viennent parce qu’ils ont faim, d’autres encore s’intègrent au petit groupe qui s’est formé pour le seul plaisir d’être ensemble. Diogène n’a pas organisé une soupe populaire, il ne joue pas au Coluche médiatique, il ne se penche pas sur la misère du monde comme ceux de l’église d’à côté. Il partage un moment avec d’autres. Qui a dit que la désargence, c’était la débâcle sociale ?...


    Des paysans mourraient de vendre à perte les produits de leurs récoltes aux supermarchés. Des citadins mourraient de ne plus pouvoir aller au supermarché. De plus en plus, ils finissent par se rencontrer, les uns pour écouler leur production au lieu de les jeter, les autres pour avoir de quoi manger sans grands moyens. Le but n’est plus l'échange, ni le profit de l’un, ni la nécessité pour l’autre. Le but est la découverte puis le respect de celui qui nourrit, de celui qui apprécie cette nourriture. Des relations se nouent entre ceux que l’on appelait jadis les producteurs et les consommateurs, des échanges s’établissent non plus autour d’un produit mais autour d’une histoire, d’une compétence, d’un mode de vie. Qui a dit que sans argent plus personne ne travaillerait ?


    De tels exemples de désargence en germe sont légion tant la crise est généralisée, humanitaire autant qu’économique, tant la désespérance et la perte de sociabilité étaient “monnaie courante” ! Je n’irai pas jusqu’à crier « Vive la crise ! » mais je me dis qu’à la classique question de la faisabilité de la désargence, de la transition du système monétaire à autre chose, une réponse est en train de naître, petite mais puissante, au pays des inventeurs de la démocratie…


    En France aussi l'idée de la désargence fait son chemin. Depuis la parution en avril 2013 du "Porte-monnaie" (voir article sur le blog), beaucoup de travail a été réalisé pour rassembler les compétences et la documentation autour de ce sujet, pour élaborer un véritable outil de réflexion. Plusieurs rencontres seront organisées, à Mâcon le 12 avril, Lyon le 19 avril, Marseille le 24 mai, Clermont-Ferrand le 7 juin... Vous serez tenu au courant de la programmation.


    Ceci explique le silence-blog de ces dernières semaines dont certains se sont étonnés....


    Tag(s) : #Désargence

     

    http://aptgchronique.overblog.com/2014/03/la-crise-grecque-remet-en-cause-l-usage-de-la-monnaie.html


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    Alternatives

    Elle vit sans argent, et s’en porte très bien

    Isabelle Tissot (Durable)

    samedi 5 octobre 2013

     

     

    Heidemarie Schwermer, 69 ans, a tout de l’archétype de la grand-mère allemande. A un détail près. Il y a quinze ans, en mai 1996, elle a fait le choix de vivre sans argent. Impossible voire impensable, direz-vous ! Et pourtant, cette expérience, qui ne devait au départ durer qu’un an, s’est prolongée. A tel point que son initiatrice n’envisage plus de vivre autrement.



     

    Les prémisses de cette idée un peu folle remontent aux années 1990. Après un divorce douloureux, Heidemarie, ancienne institutrice, s’installe avec ses deux enfants à Dortmund dans le nord-ouest de l’Allemagne, où elle ouvre un cabinet de psychologue. Les chocs pétroliers ont frappé de plein fouet la région très industrielle de la Ruhr, précipitant de nombreuses personnes dans la pauvreté. Un constat qui choque Heidemarie, convaincue qu’il ne s’agit pas fondamentalement d’un manque de ressources, mais de leur mauvaise répartition. Quelle absurdité, se dit-elle, que certains ne sachent plus quoi faire de leur argent quand d’autres meurent de faim !


    Alors que d’aucuns se seraient contentés d’un apitoiement de circonstances, cette femme énergique refuse de se résigner à cette situation de fait, persuadée que les petits gestes de chacun comptent. Elle monte un projet appelé « Gib und Nimm », en français « Donne et prend », opérationnel en 1994 à Dortmund : tout simplement un système de troc, où les gens échangent biens, services et compétences, sans aucun recours à de l’argent.


    Le succès est au rendez-vous, mais pas comme elle l’espérait : ce ne sont pas les sans-abris qui se pressent aux portes des points de rencontre « Gib und Nimm », mais les chômeurs, les retraités ou encore les étudiants… Conséquence inattendue de l’aventure « Gib und Nimm », Heidemarie se rend bientôt compte qu’elle n’a pas besoin de beaucoup pour vivre, et certainement pas de tout ce qu’elle possède. Germe alors une idée folle, ne pas dépenser un seul sou pendant un an.


    Arrive le joli mois de mai 1996, sa décision est prise. Elle donne ses biens à des amis et des connaissances, ferme son compte bancaire, résilie ses assurances, et vend sa maison. Mais hors de question de vivre dans la rue ! Elle tire parti de son réseau de troqueurs passionnés qui lui confient la garde de leur maison en leur absence contre de menus services. Elle récupère les invendus des supermarchés bios de Dortmund et s’habille avec des vêtements qu’elle a troqué au marché aux puces. Elle se refuse même à aller chez le médecin. Quant à sa retraite mensuelle de 700 euros, elle la donne à des proches qui en ont besoin. De même pour les droits d’auteur de « Vivre sans argent », le livre traduit dans cinq langues qu’elle a tiré de son expérience : la coquette somme a été reversée en coupures de cinq marks à des passants chanceux. Ses effets personnels se résument au contenu d’une petite valise. Plus 200 euros en cas d’urgence.


    D’abord tenaillée par l’angoisse du réfrigérateur désespérément vide, elle finit par apprécier de ne pas savoir de quoi demain sera fait. Au point d’adopter définitivement ce nouveau mode de vie, auquel elle ne renoncerait pour rien au monde. Heidemarie Schwermer partage son temps entre les services qu’elle rend pour assurer son quotidien, l’écriture de son troisième ouvrage, et de nombreuses conférences. « Living without the money », le documentaire tiré de son expérience n’a pas encore été diffusé en France, mais connaît déjà un franc succès dans le monde entier.


    On lui demande souvent si elle n’a pas subi de traumatisme dans son enfance qui permettrait d’expliquer ce dessein irraisonné. Aucun, répond cette native de Dantzig, à l’époque enclave allemande en terre polonaise, si ce n’est la fuite vers l’ouest devant l’avancée des soldats soviétiques à la fin de la Seconde Guerre Mondiale. Arrivée en Allemagne, la famille démunie fait l’objet de moqueries, une prise de conscience brutale pour la petite fille qu’elle était à l’époque, du pouvoir de l’argent sur le jugement des hommes.


    A ceux qui la traitent de folle, elle répond que « l’argent nous détourne de l’essentiel » et que l’abandonner lui a apporté « une qualité de vie, une richesse intérieure et la liberté ». Une démarche qu’elle souhaite pousser encore plus loin, en prônant désormais le partage totalement désintéressé, plutôt que le troc.


    Provocatrice ou prophète en avance sur son temps, le débat reste ouvert. Bien entourée et peut-être chanceuse au fond, Heidemarie Schwermer a prouvé qu’il était possible de vivre sans argent pendant quinze ans dans un pays où le troc, la récup et le système D font partie intégrante de la culture. Pas sûr qu’elle fasse des émules, et par ailleurs ce n’est pas tant son but que « de faire réfléchir les gens sur leur façon de vivre et leur relation aux autres. » Un pari réussi !

     


     

    Source : Durable

    Première mise en ligne sur Reporterre le 11 septembre 2013.

    Ecouter aussi : Pourquoi se débarrasser de l’argent ?

     

    http://www.reporterre.net/spip.php?article4659


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  • Une banque villageoise, solidaire et qui prête à taux zéro : rien d’impossible (Basta!)

    Posted: 01 Nov 2013 09:37 AM PDT

    C’est une autre manière de reprendre le contrôle de son épargne. Les habitants de la vallée d’Aspe, près de la frontière espagnole, ont décidé de se mobiliser pour relocaliser l’économie et créer des emplois. Leur association Aspe solidaire collecte l’épargne des habitants afin de financer des activités dans la vallée. Et d’enrayer la désertification. L’économie par les citoyens et au service des citoyens.


    Cela s’est produit sur le chemin de Saint-Jacques de Compostelle, mais ce n’est pas un miracle. Une centaine d’habitants de la vallée d’Aspe ont décidé de re-dynamiser l’économie de leur territoire en voie de désertification. Ils ont monté l’association Aspe Solidaire. Objectif : collecter l’épargne des habitants et proposer des prêts à taux zéro à des porteurs de projets désireux de s’installer dans la vallée, où vivent 2 700 personnes. Cette initiative « permet aux gens qui veulent faire quelque chose pour le territoire, sans avoir envie d’être élus, de s’impliquer », explique Anne, l’actuelle présidente de l’association. Car la vallée est quelque peu sinistrée.


    Avec un revenu net par foyer inférieur de 6 000 € à la moyenne nationale et une population vieillissante, la vallée d’Aspe peine à retenir les enfants du pays. La population des 13 villages béarnais qui constituent la communauté de communes a chuté de 65% depuis le début du siècle dernier ! Si l’exode rural s’est depuis ralenti, la tendance est toujours à la baisse. Quand Anne, historienne, a organisé une réunion d’information sur la mise en place d’un dispositif d’épargne citoyenne et solidaire, les riverains ont accouru. « C’était un soir de janvier 2011, il faisait froid, il neigeait, mais il y a avait quand même une centaine de personnes. Cela montre que l’idée correspondait à une attente », souligne cette conseillère municipale d’Accous, l’un des villages de la vallée, qui précise que l’association ne bénéficie d’aucune subvention.

    [...]

    Lire la suite sur www.bastamag.net

     

    Relocaliser l’économie


    Pendant la soirée, elle leur parle de l’exemple du Comité local d’épargne pour les jeunes (Clej) qui soutient des projets de jeunes basques grâce à l’épargne solidaire. L’assemblée est emballée et un rendez-vous est fixé la semaine suivante pour créer l’association. Les membres se donnent un an pour recueillir les prêts des volontaires. Emma, caissière dans une grande surface des environs, et trésorière de l’association, n’a pas été difficile à convaincre : « Niveau emploi, il n’y pas grand chose par ici. Alors j’ai été emballée par l’idée d’aider à créer de l’activité dans la vallée. »


    Plus d’une centaine d’habitants, soit 4% des habitants de la vallée, prêtent chacun 180 € à l’association (15€ par mois). « Les gens avaient envie de faire quelque chose pour dynamiser l’économie locale. Pour ma part, je voulais agir à ma façon, avec mes compétences limitées, pour faire avancer les choses, permettre à des gens de développer une activité, de vivre et d’habiter dans la vallée », témoigne Francis, retraité de l’Éducation nationale.


    Bien que la démarche soit avant tout économique, certains membres de l’association mettent en avant des considérations écologiques : « Il s’agit de relocaliser l’économie en raccourcissant les circuits de production et de consommation », argumente l’ancien enseignant. « Cela n’a pas de sens de faire une heure de voiture, de dépenser du gasoil et de polluer pour des activités dont la présence se justifie dans la vallée », ajoute Monica, une ancienne bergère.


    20 000 € sont récoltés en 2011, qui vont bénéficier à cinq projets : une entreprise de céramique, une autre de ferronnerie-mécanique, deux structures d’aide au développement commercial et un centre de soins esthétiques voient le jour. Un peintre au RSA a également fait appel à l’association en urgence pour pouvoir acheter des cadres afin de proposer ses œuvres à la vente lors d’une exposition. Ici, on ne stigmatise pas, on aide.


    Soutien financier et moral


    Parmi ces porteurs de projets, certains n’auraient pas pu démarrer leur activité sans l’association. « Les banques ne prêtent qu’aux riches, pas à ceux qui n’ont pas un radis, c’est bien connu, sourit Francis. L’argent prêté sert d’apport personnel à ceux qui n’en ont pas. » Un argument non négligeable pour convaincre les institutions financières de la viabilité d’un projet. « Avoir l’aval des gens de la vallée donne de la crédibilité auprès des banques », confirme Aurélie qui, grâce au soutien de l’association, a réussi à convaincre son conseiller de lui prêter de l’argent. Un peu plus d’un an après le lancement, la fréquentation de son salon esthétique est supérieure à ses prévisions.


    Pour autant, l’association ne répond pas favorablement à toutes les sollicitations. « Même si ce ne sont pas de grosses sommes, nous sommes attentifs aux projets soutenus par respect pour les gens qui ont placé leur espoir dans l’association », justifie Francis. Ainsi, chaque demande de prêt est étudiée par l’hétérodoxe conseil d’administration (voir la photo) et un comité technique composé de chefs d’entreprises ou de banquiers, pour la plupart à la retraite. Ceux-ci évaluent la solidité du projet et accompagnent les entrepreneurs dans leurs démarches, de l’étude de marché à la définition de leurs besoins de trésorerie. Plus qu’une somme d’argent, Aspe solidaire apporte un soutien technique et moral à ceux qui la sollicitent.


    Quand l’économie développe le lien social


    Les membres de l’association insistent sur l’aspect solidaire de leur démarche. Les membres ne peuvent espérer un quelconque retour sur investissement lorsqu’ils prêtent de l’argent. Car, quand les sommes engagées sont remboursées 3 à 4 ans plus tard, l’inflation est passée par là. « Nous ne sommes pas dans une logique capitaliste », résume Anne. En outre, les prêteurs n’ont aucune garantie de revoir leurs deniers. « Si quelqu’un ne rembourse pas son prêt, on ne se retourne pas contre lui. On se contente de répartir la perte sur tout le monde, c’est le côté militant des prêteurs. Des liens forts de responsabilité et de confiance se crée entre tous les membres », estime Francis. Et le prêt sonnant et trébuchant n’est pas l’unique levier. « Tout le monde aide à son niveau, soit en prêtant, soit en allant acheter chez une des personnes aidées par l’association. Cela crée un réseau de solidarités ». Un point de vue partagé par Myriam, membre du Conseil d’administration : « Par l’économie, on développe le lien social », juge-t-elle.


     

    Le succès de la première levée de fonds en 2011 a été tel que les membres d’Aspe solidaire ont décidé d’organiser une deuxième collecte d’épargne en 2013 pour répondre aux sollicitations de nouveaux porteurs de projets. Alors même que les premiers prêts n’ont pas été remboursés, 73 personnes se sont déjà engagées et les inscriptions courent jusqu’à la fin de l’année. Le caractère concret de l’action et sa capacité à mobiliser au delà des clivages partisans fait reconnaître à Monica, élue d’un village de la vallée, qu’elle se sent « parfois plus utile ici qu’au conseil municipal ». Une expérience à multiplier (A relire : quand les pauvres inventent une banque véritablement populaire) ?


    Emmanuel Daniel (Tour de France des alternatives)


    Photo de une : CC Jean-Michel Baud


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